La rivière de l’Achigan qui traverse de part en part le territoire de Saint-Roch-de-l’Achigan et de Saint-Roch-Ouest fait incontestablement partie de leur histoire. C’est en remontant son cours à partir de L’Assomption que plusieurs des premiers colons sont venus s’y établir à compter des années 1750. Le seigneur Pierre-Roch de Saint-Ours a tiré profit de la dénivellation qu’on y retrouvait entre le début et la fin du méandre de la rivière à l’endroit aujourd’hui connu sous le nom de la presqu’île Masson pour y faire construire en 1771 son moulin seigneurial. On y a ajouté par la suite à une date indéterminée un moulin à scie. D’autres moulins ont été construits plus tard en amont du moulin seigneurial. La disparition subséquente de ces moulins et des barrages qui en permettaient le fonctionnement nous fait oublier aujourd’hui leur existence et l’importance qu’ils ont eue dans l’économie du village. On note par ailleurs que l’aqueduc du village a puisé l’eau de la rivière pendant pratiquement une centaine d’années. C’est dans le but de rappeler le rôle important joué par la rivière que la Société désire faire connaître son histoire à l’intention de la population.
On possède peu d’informations sur l’origine de son nom et sur la période où il a commencé à être utilisé. On peut quand même vraisemblablement avancer que c’est en raison de la présence en abondance dans ses eaux de ce poisson que le nom « achigan » lui aurait été donné. Pendant longtemps, elle portait le nom de « rivière Achigan » ou encore « rivière l’Achigan ». Ce n’est que dans les années 1950 qu’on y a ajouté le « de ». Ce serait, semble-t-il, les Atikamekw, une peuplade de la grande famille algonquine, qui ont habité le territoire couvert par la rivière avant l’arrivée des premiers colons, qui l’aurait identifiée sous le nom « achikan », c’est-à-dire « celui qui se bat ». Ce poisson est bien connu des pêcheurs pour sa combativité. Lors de l’arrivée des premiers colons vers 1750, la rivière était déjà connue sous le nom de rivière l’Achigan.
Les personnes qui ont eu l’idée de longer la rivière dans le secteur de la presqu’île Masson à Saint-Roch-de-l’Achigan ont possiblement noté les différentes couches de calcaire qu’on y retrouve à plusieurs endroits sur les berges. Selon les géologues, cette formation dite de Tétreauville du groupe Trenton de la période de l’Ordovicien daterait d’environ 460 millions d’années. Il s’agit d’un calcaire schisteux, une roche sédimentaire accumulée dans des fonds marins. Le calcaire, une roche dense, en lits d’environ 10 à 20 cm, est intercalé de minces bandes de schiste, une roche plus tendre. Ils rapportent aussi que la partie nord de l’Amérique a connu un refroidissement des températures à compter de 2,5 millions d’années qui a provoqué sur ce territoire plusieurs épisodes de glaciation. Le dernier épisode qui s’est produit entre 80,5 et 11,7 millions d’années a atteint les régions de New York et des Grands Lacs. Il a provoqué une accumulation maximale de 3 200 mètres de glace au centre du Québec et d’environ 400 mètres dans la vallée du Saint-Laurent. Le mouvement de ce glacier continental a de façon importante modifié le relief et permis des accumulations de dépôts pierreux appelés moraines qu’on relève dans les champs du territoire de la municipalité et plus particulièrement sur les collines et les côteaux. Le poids et l’importance de cette masse de glace ont eu deux impacts majeurs : un affaissement de la couche terrestre équivalant à environ 25% de l’épaisseur de la glace de même qu’une baisse du niveau marin d’environ 120 mètres. Le retrait graduel du glacier à compter de 18 000 ans avant notre ère a provoqué dans la vallée du fleuve Saint-Laurent une invasion marine appelée la mer de Champlain. Cette dernière s’étendait des Laurentides aux Appalaches avec des intrusions jusqu’au fond des vallées adjacentes.
La fonte des glaces et la présence de cette mer ont laissé beaucoup de sédiments dans la vallée du Saint-Laurent. Les cours d’eau chargés des eaux de fonte ont transporté d’énormes quantités de sable et de gravier, accumulés surtout en bordure de cette mer temporaire. De plus, les argiles et les silts, la matière la plus fine contenue en suspension dans l’eau, ont recouvert les sédiments glaciaires et occupent la majeure partie de notre territoire, ce qui est à l’origine de la richesse de nos terres agricoles. Le lent relèvement de la croûte terrestre qui s’en est suivi a diminué l’ampleur de ce bras de mer. Les eaux saumâtres puis douces qui ont remplacé les eaux salées ont occupé un lac nommé Lampsilis entre environ 10 000 à 7 000 ans avant notre ère. Alors que le niveau et la surface de ce lac diminuaient, le fleuve et les rivières ont graduellement creusé leur lit dans les sédiments précédemment accumulés, soit les sables, argiles, moraines glaciaires et même le roc au point d’atteindre leur profil d’équilibre. Elles forment alors de basses terrasses dans la plaine par les nombreux méandres de leurs cours. On estime que vers 6 700 ans avant notre ère, le réseau hydrographique de la vallée du Saint-Laurent avait atteint sa configuration actuelle. Pour ce qui est de la rivière de l’Achigan, elle rejoint la rivière L’Assomption dont le lit s’oriente vers le sud, soit dans le sens contraire du cours du fleuve. Environ un siècle plus tard, le territoire se couvre, avec le retrait progressif des eaux, de végétation et de forêt.
La rivière fait partie du réseau hydrographique et du bassin versant de la rivière L’Assomption. Son origine est la décharge du lac de l’Achigan, lequel a une superficie de 3,25 km2 et est situé en entier sur le territoire de la municipalité de Saint-Hippolyte. Ce lac reçoit les eaux de plusieurs lacs, dont, entre autres, les lacs Jimmy, des Sables, Malone, des Chûtes, Duffy et Beaudry. Le bassin versant de la rivière a une superficie de 662 km2 et sa longueur jusqu’à son embouchure avec la rivière L’Assomption est de 61,6 km. Son débit moyen à l’embouchure est de 19,4m3/s. La rivière traverse les municipalités de Saint-Hyppolite, Saint-Calixte, Saint-Lin-Laurentides, Sainte-Sophie, de nouveau Saint-Lin-Laurentides, Saint-Roch-Ouest, Saint-Roch-de-l’Achigan, L’Épiphanie et finalement elle termine son cours sur le territoire de la municipalité de L’Assomption.
Elle coule en secteur forestier au début de la chaîne des Laurentides entre Saint-Hippolyte et Sainte-Sophie et en secteur agricole dans la plaine du Saint-Laurent pour le reste de son parcours. Le lac est situé à 200 mètres d’altitude et la rivière à son embouchure est au niveau neuf mètres. Cette dénivellation importante de la rivière fait en sorte que plusieurs des agglomérations situées sur son parcours ont été établies à l’endroit où il y avait des rapides importants qu’il était possible de harnacher pour y construire des moulins à farine et à scie. Ainsi, Sainte-Sophie, Saint-Lin-Laurentides, Saint-Roch-de-l’Achigan et L’Épiphanie ont été établis justement afin de tirer profit de cette situation. Tous les moulins qui avaient été construits n’existent plus en tant que tels. Cependant, une vérification au répertoire des barrages du Québec nous permet d’apprendre que l’on compte encore six barrages sur la rivière. Trois appartiennent à des propriétaires privés : un premier à Saint-Hippolyte et deux à Sainte-Sophie. Les trois autres sont situés à Saint-Calixte, Saint-Lin-Laurentides et L’Épiphanie et ils appartiennent à ces municipalités.
La rivière compte quatre affluents et une multitude de ruisseaux.
La rivière Beauport, l’un des deux affluents de la rive gauche, traverse les territoires de Saint-Calixte et Saint-Lin-Laurentides. Elle coule en bonne partie en secteur forestier. Elle prend sa source au lac de la Crosse et recueille sur son parcours les eaux d’une impressionnante quantité de lacs. Elle rejoint la rivière de l’Achigan un peu au nord de la jonction du rang 4 (ou chemin Morrisson) de Saint-Calixte et du rang Double de Saint-Lin-Laurentides. Sa longueur est de 20 km.
La Petite Rivière, un affluent de la rive gauche de la rivière, prend sa source dans le secteur du lac des Pins. Elle traverse les territoires de Sainte-Julienne et Saint-Lin-Laurentides. Dans le premier tiers de son parcours, elle longe la route 337 qui relie ces deux municipalités. Sa longueur est de 13,4 km. Elle coule en bonne partie en secteur agricole. Elle se joint à la rivière de l’Achigan à mi-chemin entre les limites ouest de la ville de Saint-Lin-Laurentides et le rang de la Côte Joseph.
La rivière Abercromby, un affluent de la rive droite de la rivière, prend sa source au lac Connely dans le territoire de Saint-Hippolyte. Sa longueur est de 10,8 km. Elle poursuit son cours dans le territoire de Sainte-Sophie et se jette dans la rivière de l’Achigan au nord de la route 158. Son parcours dans la première moitié est en secteur forestier et dans la seconde moitié en secteur agricole.
La rivière Jourdain, l’autre affluent de la rive droite de la rivière est la seule à couler entièrement sur le territoire de Sainte-Sophie. Son parcours se déroule autant en secteur agricole qu’en secteur forestier. Elle prend sa source au lac Duquette, un petit lac situé au sud du lac Écho et sa longueur est de 19,4 km. Elle se jette dans la rivière de l’Achigan un peu avant la limite entre Sainte-Sophie et Saint-Lin-Laurentides.
Les informations que l’on possède concernant les premiers habitants du territoire et la période de leur passage et de leur installation font encore l’objet de beaucoup de discussions parmi les membres de la communauté scientifique. La multitude d’écrits publiés sur le sujet en fait d’ailleurs largement foi. Selon eux, c’est entre 7 500 et 4 000 ans avant notre ère que les premiers habitants auraient fréquenté notre territoire. Leurs ancêtres venant d’Asie avaient atteint le continent américain en franchissant le détroit de Behring exondé par l’abaissement du niveau marin. C’étaient des nomades vivant de chasse et de pêche et de certaines cultures comme le maïs, les courges et les haricots. Ils se fixaient pendant l’hiver, mais ils se déplaçaient beaucoup pendant l’été. Ils auront comme descendants les différents groupes d’autochtones qui peuplaient le territoire lors de l’arrivée des Français. On sait par ailleurs que les Iroquois avaient occupé le territoire avant les Atikamekw. On rapporte que lorsque Jacques Cartier s’était rendu à Hochelaga en 1534, il avait noté la présence des Iroquois sur le territoire. Cependant, lorsque Champlain est arrivé, les Iroquois avaient quitté le territoire et ils s’étaient installés dans le secteur du lac Champlain et au sud du lac Ontario. Malgré leur éloignement de Ville-Marie, ils étaient venus à plusieurs reprises relancer les Français et leur livrer bataille. On se rappelle en particulier du massacre de Lachine en 1689 et de la bataille de la coulée Grou à Pointe-aux-Trembles en 1690.
Son territoire, qui comprenait à l’origine celui de Saint-Esprit et Saint-Lin, est développé à compter des années 1750 par des colons venant surtout de L’Assomption et de Mascouche. Ces colons se sont fait concéder des lots par le seigneur Pierre-Roch de Saint-Ours et à compter de 1782 par son fils Paul-Roch. Parmi les obligations qui leur sont imposées, les seigneurs sont tenus de construire un moulin à farine afin de permettre à leurs censitaires d’y faire moudre leur blé. On se rappelle que le pain de blé était la principale nourriture de cette époque. Afin de s’y conformer, Pierre-Roch s’est réservé des terrains en bordure de la rivière aux endroits où il est possible d’y construire des moulins. On comprend donc qu’il a estimé que le secteur connu aujourd’hui sous le nom de la presqu’île Masson est le lieu le plus approprié pour y construire son moulin seigneurial. Il conclut donc en 1771 avec François Lemaistre dit Duhaime et Paul Côté un contrat de construction d’un moulin à farine à cet endroit. On sait qu’il s’est aussi réservé des terrains à l’endroit où sera construit par la suite en amont le moulin à scie Leclerc. On ne possède aucune information concernant la possibilité qu’il se soit réservé des terrains à l’entrée ouest du village à l’endroit où se trouve actuellement l’ébénisterie Pomerleau. L’historien Jean-René Thuot avance par ailleurs que Pierre-Roch se serait possiblement réservé des terrains à un endroit situé à environ trois kilomètres à l’est du village dans le secteur de la rue de la Vallée-Ensoleillée où il y avait autrefois une chute. Cette chute provoquée par l’affleurement d’un filon de gabbro, une roche très résistante associée aux Montérégiennes, a été inondée par la hausse des eaux causée par la construction du barrage sis à l’entrée ouest de la ville de L’Épiphanie tout près de la route 341.
Les nombreuses correspondances échangées entre Pierre-Roch et son fils Paul-Roch et les évêques Briand et Hubert permettent de comprendre que la famille Saint-Ours souhaite la construction de l’église dans les environs du moulin seigneurial tandis que les évêques favorisent un site situé à environ deux kilomètres en amont du centre du village actuel du côté nord de la rivière de l’Achigan. En bout de ligne, ils parviennent à s’entendre sur le site actuel. L’ouverture des registres de la paroisse a lieu en 1787. Une première église est construite en 1803. La paroisse est reconnue canoniquement en 1832. La municipalité est reconnue en 1842, abolie en 1847 au profit de la municipalité du comté de Lachenaie et reconnue de nouveau comme entité distincte en 1855. L’agriculture demeure encore aujourd’hui l’une des activités principales de ses résidents. Il est par ailleurs important de souligner que la municipalité a connu au cours des dernières années une augmentation importante de sa population, laquelle est d’environ 5 000 habitants.
Il était situé à la fin du méandre à l’endroit où l’on retrouve aujourd’hui l’usine d’épuration de Saint-Roch-de-l’Achigan. Il avait été construit en pierre des champs et il comptait deux moulanges. Ses dimensions étaient de 45 pieds de longueur par 36 pieds de largeur. La dénivelée entre le début et la fin du méandre de la rivière - on disait autrefois la tête d’eau- était d’environ 18 pieds. Le canal d’amenée entre les deux rives du méandre avait 6 pieds de largeur. Le contrat faisait aussi mention de la construction d’une digue érigée au début du méandre entre la rive droite de la rivière et deux des îles qu’il y avait à cet endroit. En procédant de cette façon, on dirigeait une partie de l’eau de la rivière vers l’entrée du canal d’amenée.
Malheureusement, on ne possède aucune photo de l’époque où le moulin était en opération. À l’origine, le meunier dont les services avaient été retenus habitait avec sa famille à l’intérieur du moulin. Plus tard, à un moment qui n’a jamais été déterminé, une maison sise au nord du moulin a été construite afin de servir de logement au meunier. Les Saint-Ours y ont également fait construire un moulin à scie à côté de leur moulin à farine. Toutefois, on ne possède pas d’information concernant l’année de sa construction ni les années où il a cessé d’être en opération et a été démoli.
Malgré l’abolition en 1854 du régime seigneurial, Marie-Aurélie Faribault qui avait hérité de la seigneurie de L’Assomption au décès en 1837 de son époux Charles-Auguste, le fils de Paul-Roch, conserve le moulin jusqu’en 1871. Elle le vend alors à Aldéric St-André à qui elle avait cédé quelques années auparavant un moulin sis le long de la rivière Saint-Esprit. Après quelques autres transactions, le moulin passe en 1895 à Édouard Leclerc, lequel possédera plus tard le moulin situé au centre du village connu sous son nom. En 1903, Leclerc vend aux frères Élysée et Oswald Forest le matériel et les agrès du moulin à farine et il s’engage à ne pas utiliser le pouvoir d’eau sous peine de dommages. Comme le moulin à scie n’est pas mentionné au contrat intervenu entre les parties, on peut penser qu’il avait été démoli. Par ailleurs, il n’est pas mentionné non plus dans le contrat de vente de la presqu’île intervenu la même année entre Édouard Leclerc et Léandre Miron. Selon les informations obtenues par Yves Guilbeault, l’approvisionnement en eau du moulin était devenu de plus en plus difficile en raison des modifications apportées avec le temps au lit de la rivière par la force du courant.
Tel qu’indiqué plus haut, la famille Saint-Ours s’était aussi réservé une pointe de terre sise du côté sud de la rivière un peu en amont de son moulin seigneurial. Ce n’est cependant qu’en 1819 que Charles-Auguste de Saint-Ours, le fils de Paul-Roch, accepte de la vendre à Protais d’Odet d’Orsonnens. Ce dernier y fait construire dès l’année suivante un moulin à carder et un moulin à fouler et un peu plus tard une superbe maison connue sous le nom de « Chaumière suisse ». Les activités des deux moulins avaient amené quelques artisans à s’installer sur les lieux. D’Orsonnens leur avait même concédé des emplacements sous la forme d’un bail à rente qu’on appelait « vente à constitut ». Malheureusement, il décède en 1836 à l’âge de 45 ans. Les deux moulins demeurent quand même la propriété de sa famille jusqu’en 1848 alors qu’ils sont acquis par John Dalrympe. En 1858, c’est au tour de la seigneuresse Marie-Aurélie Faribault d’en faire l’acquisition. En 1871, la pointe de terre passe successivement entre les mains de Victor St-André, le père d’Aldéric, et de son gendre Louis Payette. Dans le contrat conclu avec Victor, on relève qu’il lui est interdit d’établir sur les lieux un moulin à moudre le grain. Après le décès de Louis en 1872, la propriété semble revenir à Victor pour se retrouver de nouveau en 1885 entre les mains d’Aldéric, lequel cède le tout la même année à son fils Médéric. Ce dernier voit son moulin à scie être incendié en 1894. Avec comme objectif de reprendre les opérations, il obtient de la municipalité de Saint-Roch-de-l’Achigan une aide financière de 3 000$. Hélas, Médéric n’est pas en mesure de se conformer aux obligations auxquelles il s’est engagé envers la municipalité de sorte que sa propriété est acquise en 1899 par Simon Forest, alors maire de la municipalité.
En 1903, Simon Forest décide de donner à son fils Albini la pointe de terre sur laquelle on retrouve deux maisons, le moulin à scie et le pouvoir électrique avec dynamo et autres accessoires qu’il venait apparemment de mettre sur pied. Cependant, la manufacture de tabac érigée sur la pointe est exclue de la vente. Quelques semaines plus tard, Albini décède à l’âge de 29 ans. La propriété passe alors des mains des héritiers d’Albini à son oncle Élysée Forest et à son frère Oswald Forest. En 1905, la famille est de nouveau affligée par le décès d’Élysée, ce qui amène le transfert de la propriété à Oswald, le fils de Simon. Ce pouvoir fournira de l’électricité dans les villages de Saint-Roch-de-l’Achigan et L’Épiphanie pendant de nombreuses années. Selon les informations rapportées par Jean-René Thuot, le pouvoir comprenait en 1918 une turbine reliée à deux générateurs fonctionnant à 60 cycles. Il offrait un service de nuit à 117 abonnés. Il ajoute que le pouvoir était encore en opération en 1928. Selon les informations fournies par un membre de la famille Leclerc, il a été exploité jusqu’en 1944 lorsque le moulin à scie a été détruit par un incendie.
Oswald intéressé surtout au développement de la manufacture de tabac vend en 1905 le moulin à scie, le pouvoir électrique et la maison à la société Paradis et Dion. Cette maison serait vraisemblablement la « Chaumière suisse ». Il semble que cette société connaisse des difficultés d’opération puisque Oswald en redevient le propriétaire en 1917 et cède le tout immédiatement à Édouard Leclerc. À la suite du décès de ce dernier en 1945, les opérations du moulin à scie sont menées par ses fils Donat et Ernest. Le moulin n’est plus en activité depuis la fin des années 1970. Malgré l’abandon du pouvoir électrique, la famille continue de fournir de l’électricité à ses clients. Elle achète l’électricité de la Shawinigan ou de la Gatineau afin d’être en mesure de répondre à la demande. Pour notre part, nous pouvons confirmer que Donat fournissait encore l’électricité aux deux écoles du village au début des années 1960. Ce commerce cessera quelques années plus tard à la suite de la nationalisation de l’électricité survenue au Québec en 1962 et le rachat des centrales électriques privées par Hydro-Québec.
La section de la rivière à la hauteur du village comprenait un troisième site propice à la construction d’un moulin. On possède toutefois moins d’informations relativement aux moulins qui y ont été construits. On sait qu’un moulin à farine existait à cet endroit en 1875 et qu’il appartenait à la famille de Joseph Poitras et d’Esther Guilbeault. En 1899, Eugénie Guilbeault, l’épouse de Médéric St-André déjà mentionné plus haut, en effectue l’achat. Elle y fait ajouter, entre autres, un moulin à scie, un moulin à carde, une forge et les équipements d’un aqueduc. En 1911, Eugénie s’en départit. Cependant, Édouard St-André, le fils de Médéric, achète le tout en 1916. Il abandonne rapidement les opérations du moulin à farine et du moulin à carde. En 1945, il cède le moulin à scie à Constant Lesage et à un cousin Aldéric St-André, lequel était le troisième à porter ce prénom. Ces derniers s’orientent dans la fabrication de portes et de fenêtres au point de compter au début des années 1950 une vingtaine d’employés. En 1956, Constant Lesage en est le seul propriétaire. En 1964, la propriété passe de nouveau aux mains d’Aldéric lequel la vend en 1971 à la famille Pomerleau qui y établira son atelier d’ébénisterie.
On ne retrouve actuellement sur le territoire de Saint-Roch-de-l’Achigan qu’un seul pont qui relie les deux rives de la rivière de l’Achigan. Il s’agit du pont d’Orsonnens lequel est situé au centre du village. Construit en 1952, il remplace un pont de fer érigé en 1902 dont on notait la déclivité assez prononcée de ses approches. Il avait remplacé un pont de bois qui avait été détruit ou endommagé à plusieurs reprises lors des crues du printemps. Selon Jean-René Thuot, c’est en 1829 qu’il est clairement mention de l’existence d’un pont à cet endroit.
On sait par ailleurs qu’il y avait autrefois un autre pont à environ deux kilomètres en amont à l’endroit où le ruisseau des-Anges vient se déverser dans la rivière. Il portait le nom d’Archambault en souvenir du premier propriétaire de la très vieille maison québécoise située tout près sur le rang de la Rivière Sud. On sait que ce pont existait en 1824. On sait aussi qu’en 1849 les deux ponts avaient été endommagés au point qu’on avait projeté de les reconstruire. Cependant, la population avait marqué sa préférence pour la reconstruction de celui du village. Le pont Archambault n’a en conséquence pas été reconstruit.
Aucune rivière ne se déverse dans la rivière de l’Achigan sur le territoire de la municipalité. On y trouve cependant un certain nombre de ruisseaux dont le plus important est le ruisseau des-Anges.
La municipalité possède une usine de filtration d’eau depuis le début des années 1970. Cette eau provient des différents puits artésiens qui ont été forés sur son territoire. Cependant, il n’en a pas toujours été ainsi. Selon les informations assez fragmentaires recueillies sur le sujet, le premier aqueduc public aurait été établi vers 1880. Bien évidemment, il s’approvisionnait à la rivière. Avant cette période, on pense que les personnes demeurant au village devaient se débrouiller avec les moyens du bord et s’en procurer à la rivière, chez des voisins ayant un puits de surface dit « à la bêche » ou un puits artésien dans la mesure où il en existait à cette époque. Roger Lemay fait mention qu’un permis a été émis en 1890 à l’entreprise La Compagnie d’aqueduc de Saint-Roch. Son réseau de distribution s’étendait de chez Réal Vézina à l’entrée ouest du village (aujourd’hui le secteur des Méandres) jusque chez Guy Dumont à l’entrée est. Un réservoir érigé en hauteur que l’on désignait sous le nom de « la tonne » avait été construit sur la terre de Réal Vézina. On puisait l’eau à la rivière par le moyen d’un moulin à vent ou d’un cabestan. Les tuyaux étaient en bois d’épinette. L’entreprise a connu au cours des ans différents propriétaires. La famille St-André en a été propriétaire du début des années 1900 jusqu’en 1950. Quelques citoyens réunis sous la raison sociale Société d’aqueduc de Saint-Roch-de-l’Achigan en ont alors fait l’acquisition dans des circonstances difficiles. L’eau de la rivière était devenue passablement douteuse de sorte que plusieurs citoyens évitaient d’en boire. Albert Beaudry, devenu le seul propriétaire, a dû se résoudre à faire forer des puits artésiens.
Dans son ouvrage mentionné plus haut, Roger Lemay rapporte un événement pour le moins inusité qui serait survenu sur la rivière vers 1870. Malgré nos recherches, nous n’avons pas été en mesure d’en faire confirmer la véracité. Quoi qu’il en soit, Lemay fait mention qu’à cette époque les propriétaires des différents moulins à scie établis le long de son cours achetaient des billots de bois coupés dans le secteur du lac de l’Achigan. Ils leur étaient « livrés » au printemps par le moyen bien connu en ce temps-là de la drave. Parvenus à la hauteur de l’entrée ouest du village, les draveurs chargés d’assurer la descente des billots décidèrent d’aller trinquer à l’hôtel tout proche. Apparemment, ils se seraient attardés beaucoup plus longtemps que prévu de sorte qu’un embâcle de billots se serait formé en bas du barrage du moulin qu’il y avait à cet endroit. Dans ce secteur, on sait que la rivière faisait un grand détour vers la gauche et longeait de près la rue Principale sur une certaine distance. À défaut de pouvoir emprunter son cours habituel, l’eau s’est creusé un nouveau cours vers la droite de sorte que la presqu’île qui existait jusque-là est devenue une île que Léon Majeau a développée beaucoup plus tard et qui porte son nom. Lemay apporte comme information additionnelle que cette presqu’île faisait partie selon les plans terriers de 1858 et de 1884 des terres du rang de la Rivière Sud, ce que nous pouvons confirmer.
Après toutes ces considérations, il nous faut reconnaître que la rivière de l’Achigan a autrefois contribué de façon importante à l’économie du village. En plus d’approvisionner le village pendant une très grande période, elle a aussi servi à la baignade. On la considérait autrefois comme étant une rivière poissonneuse. On doit toutefois convenir que ce n’est plus du tout le cas. Les endroits où il est encore possible pour le grand public de l’admirer sont très rares. Par ailleurs, on nous affirme que la qualité de son eau qui était particulièrement mauvaise dans la deuxième moitié du siècle précédent se serait améliorée depuis quelques années.
Source : Société d’histoire de Saint-Roch-de-l’Achigan